Articles sur la plongée (© Diving 91)



Visite du CEPHISMER

Un peu d'histoire

La guerre se termine. Cousteau intervient auprès du chef d'état-major de la marine et suggère la création d'une unité constituée qui serait vouée à la recherche sous-marine. L'idée est acceptée. Dans l'immense soulagement de la paix retrouvée, sur les ruines du grand port méditerranéen de Toulon, le GRS (Groupe de Recherches Sous-marines) est créé en 1946. A la tête de ce groupe, on retrouve deux officiers de Marine, Cousteau et Taillez, et un cadre civil, Dumas. Le capitaine de corvette Taillez, le plus âgé, en prend le commandement.

Doté d'un navire récupéré sur les prises allemandes (un aviso ex-remorqueur de haute mer "l'Elie Monnier"), d'un petit local équipé de compresseurs Junkers et de quelques scaphandres autonomes, le GRS commence ses premières activités. A l'instar des marines américaine et anglaise, la marine nationale vient enfin de se doter de l'instrument d'études qu'elle méritait pour exploiter les idées de Paul Bert. L'Elie Monnier, qui va être équipé en bâtiment support de plongeurs, commence ses croisières en Méditerranée avec des thèmes d'une extrême diversité: recherches de toutes sortes d'épaves de navires et d'avions, spéléologie, reconnaissances archéologiques et surtout expérimentations de matériels et de techniques.

1947 sera l'année des records de profondeur en plongée. F. Dumas ouvre le bal en descendant à quatre-vingt-treize mètres. Toute l'équipe suivra jusqu'à quatre-vingt-dix mètres. J.-Y. Cousteau descendra à 100 mètres de profondeur, un record. Malheureusement, en octobre 1947, le premier maître Maurice Fargues sera remonté mort d'un fond de cent vingt mètres.

Tour à tour, le GRS prend les acronymes de:

1945 - GERS Groupe d'Etudes et de Recherches Sous-marines
1973 - GISMER Groupe d'Intervention Sous la MER
???? - CEPISMER Commission d'Etudes Pratiques d'Intervention Sous la MER
1993 - COMISMER COMmandement des Interventions Sous la MER
2000 - CEPHISMER CEllule de Plongée Humaine et d'Intervention Sous la MER

Parmi les recherches les plus marquantes, citons simplement la création des tables de plongées GERS65, ainsi que les propositions d'amélioration des tables de plongées à l'air de la marine nationale. Ces travaux ont été menés par l'équipe du médecin-chef Meliet pour conduire aux MN90 accompagnées d'un mode d'emploi.

P. Tailliez
M. Fargues

Le capitaine de corvette Philippe Tailliez, commandant le GRS en juin 1946

Le premier maître Maurice Fargues décédé en octobre 1947

Les plongeurs du GRS

Les plongeurs du GRS fin 1947 (de gauche à droite): Lieutenant de vaisseau Cousteau, 2nd maître Georges, Cdt Tailliez, Maître Pinard, Frédéric Dumas, 2nd maître Morandière


Le CEPHISMER aujourd'hui

Les activités du CEPHISMER sont principalement axées sur l'essai, la mise au point et la validation de nouveaux matériels pour les plongeurs de la marine nationale ainsi que sur les expérimentations médicales liées aux procédures de décompression et aux effets de l'immersion en milieu hyperbare.

Les expérimentations en caisson hyperbare (CH500)

D'après un article paru dans "Cols Bleus" N° 2512 du 08/01/2000 par le capitaine de vaisseau Jean Azzis

La veille technologique et les recherches préliminaires menées en vue de concevoir ou de définir les matériels de plongée du futur sont parmi les missions les plus passionnantes confiées depuis 1993 au commandement de la plongée et de l'intervention sous la mer (COMISMER). La mise en oeuvre de ces missions nécessite, pour des raisons de sécurité mais aussi d' économie de moyens, d'être réalisée en caisson hyperbare en eau plutôt qu'en plongée réelle en mer. A cet effet, COMISMER dispose d'un ensemble appelé "centre hyperbare de la Marine" (CH500).

Le centre hyperbare CH500 - Cliquez sur les différentes zones pour accéder aux photos.

Il existe deux types de plongée en caisson.

La plongée en incursion consiste à amener le plongeur à la profondeur de travail et à le remonter en surface en respectant une table spécifique. Le profil de cette plongée s'apparente à celui d'une même plongée effectuée en mer. Cette technique permet une décompression de courte durée (environ une heure pour 10 à 15 minutes passées à 80 mètres). En revanche le temps réservé à l'essai en plongée est limité à 10 minutes (exceptionnellement 15). En cas d'essais répétitifs (situation où plusieurs appareils sont testés), les mises en pression successives du caisson consomment beaucoup de gaz et engendrent donc un coût supérieur. D'autre part, la remontée nécessite l'emploi d'une table de plongée spécifique en fonction:

- du mélange respiré (et donc de l'appareil utilisé);
- du temps passé sur le fond;
- de la profondeur atteinte.

Enfin, cette table de décompression spécifique doit avoir été préalablement "validée", c'est-à-dire que le calcul théorique doit avoir été préalablement expérimenté sur l'organisme humain avant les campagnes d'essais d'appareils. La plongée à saturation s'apparente en quelque sorte à une mission dans l'espace et consiste à comprimer une équipe de plongeurs à la profondeur de travail. Ils vivent dans la partie sèche du caisson (le séjour) pendant quelques jours durant lesquels ils interviennent ponctuellement en cuve humide pour procéder aux essais.Lorsque les expérimentations sont achevées, ils sont très progressivement ramenés en surface. Le mélange qu'ils respirent (en particulier le diluant qui est généralement l'hélium) se dissout petit à petit dans leur organisme : dans le sang, les os, les muscles... On parle de saturation des tissus. Il faut compter environ 12 heures pour saturer entièrement l'organisme. Cette méthode présente des avantages indéniables. Ainsi la table de remontée en surface dépend uniquement de la profondeur atteinte et non pas du temps passé sur le fond ni de l'appareil employé. De plus cette opération est connue et validée depuis de nombreuses années et l'utilisation des appareils ne nécessite pas l'établissement d'un profil de décompression spécifique. Enfin, le caisson n'est comprimé qu'une seule fois d'où une économie sensible de gaz. En revanche les plongeurs restent enfermés dans le caisson pendant plusieurs jours avec les contraintes que cela peut engendrer, même si le centre a été conçu pour cela. Une équipe de quart assure une permanence en surface durant toute la plongée et met en oeuvre une installation complexe. En outre la phase de remontée est très longue (4 jours et 9 heures de 80 mètres à la surface)

Les conditions de vie en caisson hyperbare

Le volume du caisson du centre hyperbare de Comismer est de 80 m3. La moitié de ce volume est dédiée à la partie vie. Des échanges (de matériel ou de personnel) entre le caisson et l'extérieur peuvent être réalisés. Les repas sont transférés par un sas d'une trentaine de centimètres de diamètre. Des objets plus encombrants ou du personnel médical peuvent être sassés par la tourelle qui est, dans ce cas, isolée du reste du caisson.

L'habitabilité

Durant les périodes de repos, les plongeurs peuvent se divertir et recevoir la radio ou regarder la télévision (à travers un hublot). Ils dorment sur des lits superposés qui occupent la moitié de la partie séjour. Ils disposent, par ailleurs, d'un sas sanitaire. Le reste du volume disponible permet d'installer une table dépliante. Enfin, et c'est là la première chose que l'on remarque, la voix est déformée par l'hélium (ce phénomène est communément appelé effet Donald Duck). Un décodeur permet d'améliorer les communications entre le caisson et la surface. En revanche, à l'intérieur, les plongeurs ne bénéficient pas de ce confort, à moins de porter un casque d'écoute en permanence.

Le climat

Le mélange gazeux contenu dans le caisson est composé uniquement d'hélium et d'oxygène de manière à inhiber l'effet narcotique de l'azote qui apparaît au fur et mesure que la pression augmente. Au début de la mise en pression, l'atmosphère n'est pas viable car le gonflage de l'enceinte est effectué à partir du mélange "fond" (4.5% d'oxygène pour l'expérience Entex 37). Les plongeurs respirent un mélange adapté durant cette phase, à l'aide d'inhalateurs individuels. La température ambiante est régulée autour de 30°C (il est nécessaire de légèrement surchauffer l'enceinte car l'hélium favorise les déperditions caloriques). L'hygrométrie, également surveillée, est maintenue autour de 50% d'humidité relative (la vapeur d'eau produite par la respiration des plongeurs est éliminée par une centrale). Enfin, la température de l'eau contenue dans la cuve humide avoisine 15°C.

La sécurité

Par sécurité, les substances grasses ne doivent pas pénétrer dans un milieu susceptible d'être suroxygéné car l'oxygène mêlé aux graisses devient explosif. Cette contrainte a de lourdes répercutions sur le moral des plongeurs qui se voient refuser le moindre carré de beurre ! De plus, à partir de 24 % d'oxygène, le risque de combustion augmente considérablement (à 35 % l'inflammation spontanée est hautement probable). Ce danger est surtout présent lors de la phase de remontée, aux alentours de vingt mètres. Pour cette raison, le pourcentage d'oxygène est strictement limité à 23% et les vêtements sont en coton afin d'éviter la formation d'étincelles due à l'électricité statique. Lors de ces plongées, des exercices de sécurité sont également programmés afin d'entraîner le personnel face aux situations d'urgence (incendie, plongeur en détresse, décompression accidentelle causée par une fuite...).

Le CC Dommartin, le LV Albier et les MP Debast et Tron, plongeurs démineurs, après 10 jours en caisson hyperbare lors de l'expérience Entex 37.

Lien sur l'histoire du CEPHISMER (PDF source www.philippe.tailliez.net)

Diaporama du COMISMER (Mai 1997 - © Diving91)

Les locaux du COMISMER


Caisson de décompression Monoplace


Le caisson 'séjour' accolé à la tourelle


La tourelle au dessus de la cuve humide


Le pupitre de commande


Les réserves de mélange


Le caisson 'séjour' vu par le sas de la tourelle


Profil de plongée profonde à 180m


Profil de plongée profonde à 450m